La pièce “Nezhaw Fel Harb” : Au-delà des bombes, des makrout et du blues

La pièce “Nezhaw. Fel. Harb” (On s’amuse pendant la guerre) du metteur en scène Halim Zedam a été présentée le dimanche 31 décembre 2023, à la faveur de la compétition du 16ème FNTP au Théâtre national algérien Mahieddine-Bachtarzi (TNA). Adaptée du texte «Pique-nique en campagne» du dramaturge espagnol Fernando Arrabal, l’œuvre jongle habilement avec l’absurde pour livrer une méditation profonde sur la vie en temps de guerre

Pendant une heure, la pièce produite par l’association culturelle Numidia de Bordj Bou Arreridj raconte, une histoire qui se déroule dans un champ de bataille, précisément au camp numéro 47, où un soldat assure la garde. L’inattendu se produit avec l’arrivée de deux hommes âgés déterminés à savourer un pique-nique, ignorant les dangers. Le metteur en scène réussit à créer une atmosphère dérisoire et comique au milieu des hostilités, avec des dialogues déjantés et des situations inattendues

Un  quatrième personnage, un soldat du camp adverse numéro 74, apparait, attiré par la musique et en quête de paix loin, des horreurs de la guerre. Le choix des personnages, notamment les deux vieillards et le soldat du camp adverse numéro 74, apporte une dimension satirique à la pièce. L’installation d’un pique-nique au cœur du conflit devient une métaphore puissante, soulignant l’absurdité des situations que la guerre peut engendrer. Les gestes simples, tels que déplier des chaises de plage et déguster des makrout au miel, deviennent des actes de résistance face à l’inhumanité du conflit

Halim Zedam est parvenu à extraire des éclats de rire du public tout en dénonçant les non-sens  de la guerre. Le soldat du camp ennemi apporte une touche d’humanité au milieu du chaos. La musique et le cinéma, présentés comme des échappatoires aux conflits, jouent un rôle significatif dans la pièce, sont des moyens de résilience, démontrant le pouvoir de l’art pour apaiser les tensions et unir les individus même dans les moments les plus sombres.

La présence d’une jeune fille, travaillant à transporter les corps des victimes, ajoute une dimension tragique à l’œuvre. Son innocence confrontée à la réalité brutale de la guerre offre une critique poignante de la manière dont les générations futures subissent les conséquences des erreurs de leurs aînés

Lors du débat, qui a suivi la représentation, Halim Zedam a expliqué que « le titre constitue la première impression du spectacle. J’ai délibérément choisi d’ajouter deux points dans le titre de la pièce. Le spectacle est construit à partir d’images et de messages que nous pouvons décoder, mais nous laissons au public la liberté de faire sa propre interprétation

Le choix de l’absurde est, selon lui, un défi ardu pour tout artiste, car chaque phrase propose plusieurs significations. En ce qui concerne la présence de lafille, il a expliqué qu’elle incarne l’innocence, symbolisant l’enfance en danger, une réalité qui se déroule actuellement à Ghaza. Il souligne que « ce sont les enfants innocents qui paient le prix fort, ainsi que des soldats qui n’ont rien à voir avec le conflit

« L’idée sous-jacente de la pièce est que ceux qui font la guerre en sont les premières victimes. La guerre, dans toute son absurdité, est symbolisée par les deux vieillards qui, autrefois ennemis, ont finalement compris la futilité du conflit et sont devenus amis. Ils se retrouvent au cœur d’un champ de bataille pour contempler l’absurdité de la guerre », a-t-il confié

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