La pièce “El Mouhtached”, présentée lors de la 6ème soirée du Festival national du théâtre professionnel (FNTP), a attiré un public nombreux, offrant une immersion poignante dans une tragédie infligée par le colonialisme français. Sous la direction de Sifeddine Bendar, diplômé de l’ISMAS, la pièce explore la résilience face à l’injustice et la trahison à travers l’histoire de Aâmi Lakhdar et de son combat pour la libération de l’Algérie
D’une durée de 65 minutes, le spectacle dévoile les promesses non-tenues de l’occupant français dans un Douar des Aurès. Les villageois, mis dans un camp d’internement administratif, confrontés aux mensonges et à la diversion, subissent la mobilisation forcée des jeunes algériens pour des conflits qui ne les concernent pas. Réduits à des données numériques après le siège du village, les autochtones résistent avec détermination
“El Mouhtached” plonge dans l’épopée de la lutte armée algérienne contre l’envahisseur français, mettant en lumière la quête de libération du peuple algérien emprisonné dans les camps surveillés par des militaires. La pièce s’articule autour d’Aâmi Lakhdar, un vétéran du Vietnam qui, malgré la trahison de l’occupant, reste résolu. Un soldat français découvre que son père a combattu aux côtés d’Aâmi Lakhdar et, séduit par l’histoire, aide ce dernier à obtenir des autorisations de sortie. L’histoire complexe explore également le personnage de El-Goumi, considéré comme un traître, déconstruisant l’idée idéale de la résistance. Révélant plus tard son statut de Fidaï envoyé par l’Armée de Libération Nationale (ALN), Si Youcef demeure un héros méconnu de la colonisation française.
La pièce met également en lumière le rôle crucial des femmes dans la propagation de la conscience nationale à travers Gamra. Portée par des acteurs talentueux tels qu’Abel Bouchema, Toufik Rabhi, Laïd Benamara, Hakim Benkhaled, Yousra Manar, Hana Chefrour, Haroun Errachid Reghis, la densité du propos a suscité des réactions d’adhésion aux émotions exprimées. La scénographie d’Abderrahmane Zaboubi, récemment nommé à la tête du Théâtre régional Kateb-Yacine de Tizi-Ouzou, a recréé magistralement l’atmosphère du siège, renforcée par un éclairage esthétique. La bande son d’Abdeladim Khomri, ancrée dans la culture autochtone, oppose subtilement l’esprit d’occupation Critiques et explications
Malgré les éloges, certaines critiques ont souligné l’absence d’action et de contrastes dans la mise en scène. Le réalisateur Sifeddine Bendar a répondu en promettant d’améliorer le jeu des acteurs et de clarifier les situations ambiguës, défendant la pertinence de la chute symbolique du spectacle
Les louanges suscitées par “El Mouhtached” ne sauraient occulter les critiques constructives émises lors de la 6e soirée du FNTP. Certains spectateurs ont regretté l’absence d’action palpable, soulignant que la pièce reposait essentiellement sur le discours, avec une notable absence de transitions et de contrastes. Cette critique met en lumière la nécessité d’un équilibre entre le discours dense et une mise en scène plus dynamique.
Sifeddine Bendar, le réalisateur, a répondu aux critiques en soulignant que chaque parole de la pièce était étudiée, et a promis des ajustements pour améliorer le jeu des acteurs et clarifier les situations qui semblaient aux téléspectateurs ambiguës. Il a également justifié le choix de la chute symbolique, représentée par un cartable laissé par un militaire français. Ce cartable, selon Bendar, représente l’Histoire, les dossiers en suspens entre occupant et occupé, symbolisant le contentieux toujours pendants entre colonisateurs et colonisés. Malgré la défense du réalisateur, certaines voix ont insisté sur la nécessité d’une action plus perceptible pour renforcer l’impact émotionnel de la pièce. En dépit de ces critiques, “El Mouhtached” reste une œuvre poignante qui offre une plongée émotionnelle dans l’histoire complexe de la résistance algérienne, tout en ouvrant des pistes de réflexion sur la représentation théâtrale de la lutte pour la liberté
