Les mascarades féminines du nord du pays sont des cérémonies anciennes liées aux rituels du henné ?Qu’est ce qui a suscité votre intérêt pour les spectacles féminins traditionnels Ce qui m’a intéressée, ce sont les mascarades féminines du nord du pays, des cérémonies anciennes liées aux rituels du henné dans de nombreuses régions, y compris en Kabylie, appelées Bou Cheikh. Les Kabyles la nomment également Amghar Bouchekouf ou Bouafif. J’ai remarqué que cette mascarade, à l’origine masculine, comme le mentionne Jean Servier dans son ouvrage “Traditions et civilisation berbère”, publié en 1985, a évolué pour devenir exclusivement féminine au fil du temps. Le rituel a été documenté en Kabylie par Rabia Boualem et a été repris par Dahbia Abrous. Rabia a rassemblé un grand nombre de jeux poétiques liés au rituel du henné, et j’ai moi-même constitué un corpus important sur le “Takdam”, le chant qui précède la mascarade de Bou Cheikh, ainsi que sur ceux qui suivent cette mascarade. ?En quoi ces rituels ancestraux peuvent-ils être fondateurs de texte pour le théâtre Il existe un genre de théâtre qui s’inspire spécialement de ces textes. Ce sont, comme on le souligne souvent, des spectacles pré-théâtraux, des performances populaires qui peuvent être très inspirantes pour la création théâtrale. Nous disposons des textes enregistrés qui peuvent donner naissance à d’excellents spectacles pour le théâtre. ?Vous avez été immergée dans une troupe de la Sebeiba, qu’avez-vous tiré de cette expérience C’était une expérience extraordinaire. Tout d’abord, j’ai appris la langue, j’ai mémorisé les textes des chansons et j’ai appris à chanter avec ces femmes âgées, à comprendre leurs rituels, leurs gestuelles et leur manière d’interpréter leurs chansons. C’est une contribution très importante pour moi, d’abord sur le plan personnel, puis sur le plan culturel. Ce séjour m’a transformée en tant que chercheuse et en tant que femme. Cela m’a ouvert les yeux sur un monde très riche, tolérant et créatif. Cette expérience me manque beaucoup. Depuis la fin de mes recherches sur le sujet en 2014, cette sensation unique me manque énormément, et évoquer ces souvenirs suscite en moi une émotion particulière.
