Monologue « Kiass ou Labess » de la coopérative Rocher-Noir de Boumerdes


                  El Ayachi face à ses fantasmes et à ses déceptions

« Kiass ou Labess », une comédie noire à une seule voix, est l’intitulé de la pièce présentée, lundi 15 mars 2021, ,en  hors-compétition, au théâtre communal d’Alger-Centre (ex-Casino), et ce, dans le cadre de la 14ème édition du Festival national du théâtre professionnel, par la coopérative Rocher-Noir de Boumerdes.  

Sur un texte d’Ahmed Rezzak et mise en scène par Abdelghani Chentouf, la pièce, qui est un one man show, met en scène les péripéties d’El Ayachi, interprété par Fouzi Bayet ; elle raconte les déboires amoureux de ce dernier.  La pièce se déroule dans une scénographie sobre et succincte, seulement composée d’éléments qui nous rappellent que le lieu qu’occupe l’action et dans lequel les événements qui l’articulent s’enchainent à un rythme fluide et soutenu, est un hammam. Cela est perceptible au champ sémantique du décor, celui-ci est organisé autour de plusieurs référents, à savoir la tuyauterie, la robinetterie, la douche, la conduite de gaz et d’autres accessoires liés au hammam.        
Message d’amourC’est dans cette spécialité substantielle et signifiante qu’El Ayachi, loquace et sémillant, à  la personnalité attachante et à l’humeur marquée, commence à raconter ses déconvenues sentimentales dans un langage dense et aux contours métaphoriques et allusifs.  Elle  s’appelle Romana, et il en est éperdument fou amoureux d’elle. Il essaie de lui écrire une lettre pour lui dire ce qu’il ressent pour elle, mais à chaque fois, il déchire la feuille ou biffe ce qu’il a écrit, parce qu’il ne trouve pas les mots justes et appropriés pour lui témoigner avec franchise de ses sentiments sincères. Il a du mal à s’exprimer.  D’ailleurs, l’espace scénique est jonché d’un tas de papiers déchirés, suggérant  le  nombre de lettres  jetées, qui témoignent de la détresse émotionnelle d’El Ayachi. Ayant honte de son métier de « kiass » (masseur), El Ayachi, plein d’humour, lui dit qu’il est tantôt chanteur, tantôt maçon, tantôt commissaire, et à chaque fois il rature ses déguisements, parce qu’il est trop honnête envers sa personne, il est égal à lui-même et il ne peut supporter de se dissimuler derrière des mensonges et des artifices. Il a des principes et des valeurs. Et il finit, sans honte, par s’accepter tel qu’il est, par se résigner à sa condition et d’accepter, en toute humilité, son métier qu’il considère comme n’importe quel autre métier. D’où l’intitulé de la pièce : « Kiass ou Labess ».         
Subtil « je »Dans ce monologue où viennent habilement se conjuguer la comédie au drame, Fouzi Bayet, à travers El Ayachi, tient des propos souples mais expressifs, chargés de sous-entendus ; sans pour autant approfondir ses intentions, il passe en revue différentes situations de la vie, pour pointer du doigt ce qui ne va pas et établir les responsabilités.  Fondée en 2002, la Coopérative «Le Théâtre Rocher noir» de Boumerdès, présidée par le comédien Fouzi Bayet, a d’abord voulu s’investir dans le théâtre pour enfants, avant d’élargir son action sur le théâtre dans  la  diversité de ses registres et son universalité. Comptant à son actif plusieurs projets réalisés dans le 4 Art, la coopérative a produit entre autres pièces de théâtre, « Kafilet el mahabba » (2003), « Karakou for Night » (one man show- 2004), « Nesmah ou ma nensach » (2007), « Malhamet ech’chahid » (2010) et, en 2014, le spectacle pour enfants « Nadafet el mohit ».

Yacine Idjer

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